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Ouvrages encyclopédiques

Auteur: Joseph-Claude POULIN (2015)

Sous l’appellation de « publications à caractère encyclopédique » sont visés ici des ouvrages – généralement collectifs – qui appartiennent aux catégories des lexiques historiques, dictionnaires spécialisés (y compris des dictionnaires exclusivement biographiques) et des encyclopédies scientifiques, à l’exclusion des dictionnaires ou encyclopédies généraux (Larousse, Littré, Quillet, Robert et autres). Les publications concernées ici, souvent fort volumineuses, ne sont pas destinées à une lecture intégrale : ce sont des ouvrages de consultation, des instruments de travail, communément appelés « usuels ». Dans une présentation condensée, des spécialistes y proposent des survols synthétiques sur un objet précis et des définitions historiques (pas simplement lexicales).

Il existe des centaines de tels dictionnaires utiles aux historiens. L’importance traditionnelle des dictionnaires savants dans la vie scientifique internationale peut s’apprécier à l’aide d’un guide général comme celui de Brewer. Leur nombre et leur qualité s’accroissent régulièrement, notamment par l’action de certaines maisons d’édition qui s’y consacrent intensivement; ils sont de plus en plus souvent accessibles par Internet (par exemple chez Oxford University Press). Il est prévisible que le tournant du XXIe siècle va stimuler une production spécialement appliquée à l’histoire du XXe siècle.

Voir par exemple

Jean-Pierre RIOUX et Jean-François SIRINELLI dir., La France d’un siècle à l’autre, 1914-2000. Dictionnaire critique. Paris, Hachette, 1999, 757p. Contrairement à l’usage, les exposés de ce dictionnaire ne sont toutefois pas rangés par ordre alphabétique du titre des articles : les concepteurs ont plutôt choisi des présenter des notions ou traces jugées révélatrices de l’évolution récente, regroupées en six rubriques.

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Les listes structurées disposées dans le répertoire de H-H n’énumèrent que les meilleurs de ces dictionnaires parmi les plus récents; ils présentent tant des renseignements à caractère historique (l’histoire) que des notions et concepts relatifs au métier d’historien (l’historiographie). Une présentation méthodique de cette production savante et un apprentissage de son maniement s’impose donc pour les fins générales de la formation fondamentale en histoire et pour les fins particulières de la formation à la recherche documentaire.

Pourquoi ne pas se contenter de l’encyclopédie Wikipédia pour chercher de l’information historique ? Pour deux raisons au moins :

  1. Il est inutile de piocher au hasard dans Wikipédia si l’on ne sait pas ce qu’on cherche. La première étape logique, incontournable, est de préciser les coordonnées de la question à étudier et définir un angle d’approche. Cette démarche intellectuelle a préséance sur l’exercice technique de recherche bibliographique ou de formulation de références.
  2. La bonne nouvelle est qu’on trouve de tout sur Wikipédia; la mauvaise nouvelle est qu’on trouve de tout sur Wikipédia. Pour distinguer le meilleur du moins bon, il faut déjà être plus aguerri que ne le sont des débutants; le contenu des articles de Wikipédia n’est recevable que s’il est soigneusement vérifié, en gros et surtout en détail, à l’aide d’instruments de travail offrant de meilleures garanties. Alors, pourquoi ne pas commencer tout simplement par ces derniers ? C’est à leur découverte méthodique que conduit H-H, pour l’histoire de toutes les périodes et tous les continents.

À cela s’ajoute la conviction que la conversation savante ne peut pas se dérouler derrière le voile de l’anonymat, individuel ou collectif; avant d’aller à la rencontre des idées d’un auteur, il faut savoir qui parle. Son identité fait partie des critères à considérer pour évaluer la fiabilité du message.

Pour en savoir plus sur Wikipédia

Pour une évaluation d’ensemble, sur le mode sceptique : Pierre Gourdain et aliiLa révolution Wikipédia : les encyclopédies vont-elles mourir ? Paris, Fayard, 2007, 142 p.; avec une préface de Pierre Assouline.

Roy Rosenzweig est plus optimiste: « Can History be Open Source ? Wikipedia and the Future of the Past », dans: Journal of American History, 93:1 (juin 2006), p. 117-146: http://jah.oxfordjournals.org.

Pour un exemple d’évaluation détaillée des mérites et limites de Wikipédia dans le domaine historique, voir l’exercice critique nuancé appliqué à l’histoire de la Querelle des Investitures (dernier quart du XIe siècle / premier quart du XIIe siècle) par David G. Halsted, « Accuracy and Quality in Historical Representation : Wikipedia, Textbooks and the Investiture Controversy », dans : Digital Medievalist (Lethbridge), 9 (2013) : http://www.digitalmedievalist.org

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L’exposé suivant répondra à deux séries d’interrogations et est découpé en autant de sections :


1)  Que sont les publications à caractère encyclopédique pour historiens?

Ces dictionnaires se déclinent selon une typologie variée : par périodes historiques, par zone géographique, par thème ou domaine d’intérêt, souvent élaborés dans un cadre national. Certains sont exclusivement biographiques, mais la majorité est polyvalente et traite à la fois de personnages, lieux, événements, concepts, artefacts, etc. Il faut apprendre à combiner leur emploi, afin de profiter de leurs qualités complémentaires.

Le contenu de ce type de publication est généralement découpé en un grand nombre d’articles (facilement plusieurs centaines) de longueur variable, classés selon l’ordre alphabétique. Dans certains cas, cependant, un découpage par période historique est préféré pour scander les volumes successifs d’une collection; chaque période est alors traitée de A à Z à tour de rôle.

Pour en savoir plus

Par exemple, c’est le parti qui a été choisi par les éditeurs des dictionnaires suivants :

  • World History Encyclopedia (Santa Barbara, 2011, 21 vol.)
  • Dictionary of World Biography (Chicago, 1998-2000, 10 vol.)
  • Dictionnaire des biographies (Paris, 1992-1995, 6 vol.)
  • Who’s Who in British History Series (Londres, 1988-1997, 8 vol.)
  • Encyclopedia of American History (New York, 2003, 11 vol.)
  • Dictionnaire biographique du Canada (DBC; Québec, en cours depuis 1966; 14 vol. parus en 2015)
  • Australian Dictionary of Biography (Melbourne, 1966-2012, 20 vol.)
  • Encyclopedia of American Cultural and Intellectual History (New York, 2001, 3 vol.)
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La présentation des articles dans les meilleures encyclopédies répond à un modèle relativement uniforme :

  • d’abord une synthèse relativement condensée fait le tour d’un sujet de façon efficace et compréhensible par des non-spécialistes, sans se perdre dans les détails.
  • Les articles sont habituellement suivis d’une orientation bibliographique succincte qui facilite l’exploration et l’approfondissement d’un sujet; cette bibliographie était à jour au moment de la parution du volume ou du fascicule qui porte l’article visé.
  • Il arrive aussi fréquemment que les articles s’accompagnent de corrélats, c’est-à-dire de renvois ou liens à d’autres articles ou mots-clés liés au même sujet; ces indications constituent autant de pistes de lecture sur d’autres facettes de la question traitée ou sur des éléments notables de son contexte.
  • Enfin les meilleures de ces publications comportent un index des matières, parfois fort développé, sous des noms variés, comme Thesaurus ou Tables analytiques; cet outil précieux permet de retrouver les principales occurrences d’une mention disséminées dans un dictionnaire donné, y compris dans des articles auxquels le lecteur n’aurait pas pensé spontanément de se reporter pour continuer d’étoffer sa connaissance ou sa compréhension d’un aspect de l’histoire.

Dans le cas d’encyclopédies en plusieurs volumes, il arrive qu’un écart important (parfois plusieurs décennies) sépare le début et l’état présent de la série; il faut donc surveiller les dates de parution pour évaluer l’état plus ou moins actuel des connaissances et interprétations qu’ils portent. En outre, il faut prendre garde au fait que certains dictionnaires sont colorés par une orientation idéologique particulière; la lecture de l’introduction permet habituellement de repérer le biais en question.

Pour en savoir plus

Ainsi par exemple, pour l’histoire du XXe siècle :

  • Glassé, Cyril. The New Encyclopedia of Islam. Walnut Creek (CA), AltaMira Press, 3e éd. 2013, VIII-736 p. L’auteur est un Américain converti à l’Islam; il adopte un point de vue confessionnel partial.
  • Primakov, Evgueni et alii, What’s What en politique internationale. Livre de référence. Moscou, 1989 (d’abord paru en russe en 1986), 479 p. Lexique historique qui constitue un monument de la pensée soviétique juste avant la chute du Mur de Berlin (1989).
  • Sfeir, Antoine dir. Dictionnaire mondial de l’islamisme. Paris, Plon, 2002, 518 p. Usuel de référence né de l’inquiétude face à la montée de l’islamisme (angl. Fundamentalism), comme dérive extrémiste de la religion musulmane.
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2)  Quand, comment et pourquoi se reporter aux publications à caractère encyclopédique?

Ces instruments de recherche documentaire procurent des points d’appui efficaces pour le développement méthodique d’une opération de recherche documentaire; ils jouent pleinement leur rôle en association avec les grands manuels, synthèses d’ensemble, monographies savantes et revues spécialisées, auxquels ils renvoient d’ailleurs souvent. Ils apportent un concours précieux à toutes les étapes d’une recherche documentaire :

  • au début d’une recherche, pour mettre en situation assez largement un point d’histoire dans un délai raisonnable;
  • tout au long d’une recherche, pour étoffer de précisions croissantes la maîtrise de la question explorée;
  • encore vers la fin, pour élucider des points plus marginaux ou complémentaires, sans s’obliger à y consacrer un programme de lecture démesuré.

La première difficulté à résoudre est d’identifier lesquels de ces usuels sont le plus susceptibles de bien répondre aux besoins d’une recherche documentaire donnée. Les listes de titres énumérés donnent accès à une sélection des meilleures publications récentes de ce type; elles permettent aussi d’entrevoir la grande diversité de cette instrumentation. H-H a adopté une politique de sélection draconienne; non par fétichisme de la nouveauté, mais pour donner d’abord accès à l’actualité de l’édition savante en matière encyclopédique. Mais il faut se souvenir que d’autres dictionnaires ou encyclopédies un peu plus anciens gardent leur utilité; une fois passée la première initiation à cette famille d’usuels, il deviendra possible d’élargir le cercle des bonnes fréquentations. Car il est de bon conseil d’utiliser plus d’un grand dictionnaire pour une recherche documentaire donnée.

Pour en savoir plus

Parmi les grandes encyclopédies, certaines ont connu plusieurs éditions successives (révisées ou non). Il ne s’ensuit pas automatiquement que les versions plus anciennes perdent du coup tout mérite. Car la date de parution n’est pas le seul facteur de garantie de qualité; seule une analyse critique nuancée permettra de départager les nouveautés médiocres des monuments anciens encore mémorables. Deux exemples contrastés illustreront cette proposition :

  • depuis le XVIIIe siècle, l’Encyclopaedia Britannica a connu de nombreuses refontes, jusqu’à la version présentement diffusée par Internet. Mais son édition de 1911 se distingue encore à juste titre par sa qualité (pour l’époque).
  • La Catholic Encyclopedia a paru une première fois en 1907-1914 (16 vol.); puis son descendant a été publié sous le nom de New Catholic Encyclopedia en 1967-1979 (18 vol.). Une version révisée de cette dernière a finalement paru en 2003 (19 vol.). Mais c’est la première édition (séculaire !) qui a été mise en ligne (http://www.newadvent.org/cathen); son apparence de modernité ne doit pas faire oublier que son information est vieillie, ses interprétations dépassées et ses bibliographies caduques.
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Une deuxième difficulté est de trouver où se loge l’information recherchée dans une publication donnée; car la matière pertinente à une recherche particulière n’est pas forcément concentrée sous le premier intitulé qui vient à l’esprit. Il est de bonne politique de consulter plusieurs articles dans un dictionnaire donné, afin de profiter au maximum de son effet de levier permettant d’améliorer à peu de frais la maîtrise d’une question.

Les publications à caractère encyclopédique ne sont assurément pas toutes d’une utilité égale; l’expérience enseignera bientôt à repérer les plus performants pour une entreprise donnée de recherche documentaire. Quand le lecteur a l’impression que leur contenu devient répétitif, c’est qu’il a momentanément épuisé leur apport et qu’il est prêt à passer à des publications d’un autre type, plus détaillées ou plus spécialisées.

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